La Copperplate a longtemps régné sans partage sur les cartes de visite. Pourtant, Intaglio a toujours dédaigné cette police d’écriture. On vous explique pourquoi.
Un caractère bien trempé
Chez Intaglio, on noue avec la typographie un rapport amoureux. Il y a des polices de caractères qu’on aime un peu, passionnément, à la folie. D’autres avec qui on entretient une relation contrariée, voire boudeuse. La Copperplate fait partie des dernières : on l’a toujours fuie, préférant composer nos cartes de visite avec des polices moins célèbres. Ce n’est pas qu’on la trouve sans attraits. Au contraire, on lui reconnaît une certaine noblesse et un caractère bien trempé, incisif même. Mais on la suspecte de se faire passer pour ce qu’elle n’est pas, de manquer d’authenticité.
L’origine de la Copperplate : le burin du graveur sur la plaque de cuivre
Créée en 1905 par le typographe Frederic Goudy, elle est pourtant devenue la reine des travaux de ville. Elle figure en effet sur des milliers de cartes de visite. Il faut dire qu’elle confère à tout écrit une élégance subtile. Imitant le burin du graveur qui vient donner du tranchant à la lettre creusée en taille-douce dans le cuivre, c’est une linéale où se logent de discrets empattements. Son élégance vient de là. Et c’est bien ce qu’on lui reproche. La Copperplate, jusque dans son nom, rappelle que les caractères d’imprimerie furent longtemps gravés sur des plaques de cuivre (en anglais, cuivre se dit copper). Or, quel typographe recourt encore à ce procédé ? Aucun : la lettre gravée est tombée en désuétude, détrônée par d’autres techniques d’impression. De ce fait, la Copperplate est un peu le Canada Dry des polices de caractères. Elle a le goût de la gravure, elle en a la saveur, mais elle n’en est pas. Comment dès lors ne pas la juger sévèrement, comme une usurpatrice ? Cela dit, son sort semble prouver l’existence d’une justice typographique : après avoir régné sans partage sur les travaux de ville, elle est aujourd’hui détrônée pour les raisons même qui l’ont couronnée. Soit par abus d’imitation.
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